Forêts paisiblesVaudeville mythologique
Dans cette fable féroce, entre vaudeville et mythologie, la famille nucléaire est l’empire de la transgression du tabou et de l’hypocrisie absolue.
Martine Wijckaert fait partie de ces rares sensibilités qui, par singularité personnelle autant que par conviction politique, s’ingénient à déborder les frontières de leur discipline artistique en les effritant par les marges. Forêts paisibles, sa dernière création, n’y fait pas exception.
La scénographie vaut avertissement, tout y sera ambigu. Les murs sont tapissés comme à la maison d’un motif suggérant un biotope marécageux en sous-bois. Mais une fontaine à eau et un rideau de douche sur tringle nous suggèrent qu’on est tout aussi bien dans un appartement bas de gamme où va pourtant se déchaîner un monde archaïque, fondamentalement pulsionnel, celui d’un couple de satyres flanqué de sa progéniture adolescente. Médiocres, vulgaires et velus aux sabots fendus, les parents se lamentent d’avoir engendré une enfant « anormale » : rebelle, glabre et en baskets. Terrée dans sa « chambre » – une tente de camping – celle-ci remâche sa résistance à ressembler à ses dégénérés de parents.
Dans cette fable féroce, entre vaudeville et mythologie, la famille nucléaire est l’empire de la transgression du tabou – de l’inceste au meurtre – et de l’hypocrisie absolue. Jubilatoires, les chamailleries de Véronique Dumont, Alexandre Trocki et Héloïse Jadoul dessinent un inframonde entre la vie quotidienne de Pan le satyre et celle des Deschiens. Aussi rustres dans leurs relations que raffiné·es dans leur langage, père, mère et fille font et défont les alliances, envisageant les homicides les plus barbares et se vautrant joyeusement dans leur fange, pour une décapante bacchanale à l’humour corrosif.
Production La Balsamine